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Découvrir un nouvel écrivain (1)

11 Mars 2023, 15:10 L'avis d'artiste Citations etc

 

Je viens de découvrir un nouvel écrivain, ça n’arrive pas tous les jours. Je l’ai découvert par hasard. Et aussi, c'est un peintre et un plasticien. Et en plus c’est mon frère, Pierre Desvaux. En passant chez lui, je remarque sur une table basse deux livres au titre assez obscur « AQTP 0-5 » et « AQTP 11-14 » (il manquait « AQTP 6-10 » que j'ai reçu plus tard), signés Ux.


Quand le titre d’un livre est obscur, on peut simplement entrer dedans pour voir, s’habituer à l’obscurité, et dans le cas présent, elle se révèle éclairante. Une obscurité riche de nuances, voire lumineuse, qui nous repose de tout ce qui brille sans éclairer.


Il s’agit d’une sorte de journal, sans nom de personnes ou de lieux, ni de dates, qui aligne des petites phrases, des bijoux d’écriture, poétiques, philosophiques. Et des propos sur l’art, la peinture, la condition de l’artiste ou de tout autre humain, dans ce monde qui va très vite sans savoir où il va. il y a aussi de l’humour, de brefs flashes d’observation sur les banalités aimables, ou ridicules, ou curieuses qui traversent les jours. Une lecture à la fois profonde et légère, haute et basse, aérienne et liquide. Un seul défaut : j’y ai trouvé tant de pépites que j’ai dû me retenir pour ne pas recopier toutes les pages.
 

Quelques extraits

De quoi chacun a besoin ? D’attention et d’affection. De vérité et de drôlerie.

Aimer est la seule manière supportable de vivre.

Un flux grandissant de chef-d’œuvres arrive par tous les canaux disponibles. L’abondance élime le désir même de ces prouesses. La méditation régule ce flux incessant.
-Quoi d’autre ?
-Se contenter de peu.

Tu fais de l’art en catimini, rien d’essentiel pour tes contemporains qui préfèrent la notoriété, la marque. La poésie appliquée est un échappatoire aux numéros de cirque.
Tu construis les balises d’un univers mobile. Science et mathématiques à saute-moutons.
-Où es-tu maintenant ?
-Dans l’overdose des chamallows-culturels
-Tu cherches à sortir du silo à grains des valeurs mimétiques.
-Oui, bien sûr, et quelle est la valeur qui te fait vivre ?
-Les oiseaux.
-Fais plus simple mon ami, accepte que ta pensée flottante soit une constellation de noms manquants.

Un peu d’attention a transformé les nuages en cadeau du ciel.

Vois les choses comme elles sont. NE LES IMAGINE PAS au risque de vivre comme un lave-linge avec un mode d’emploi de magnétoscope.

Tout cela est incompréhensible, la compréhension n’est pas la bonne clef. La création est imprévisible. Le chemin est beau, long, obscur quelquefois.

Les moments d’euphorie succèdent aux descentes dans une alternance de pistons.

Des centaines d’œuvres ne peuvent rien à la quête danaïde de la reconnaissance de soi. Être aimé simplement parce qu’on est là est le seul viatique dont l’absence cause la panne essentielle.

Accepte que -rien- ne soit comme tu l’attends et ris.

Nous sommes tous des feuilles bientôt mortes. La conscience de cette fragilité peut être une force si l’on en convient.
Il n’y a aucune règle, ni justice, ni statistiques ni même de proverbe pour assurer le lendemain.

Tu ne peux pas conseiller de façon neutre. Tu n’enseignes pas la peinture, tu partages l’expérience vécue de la parole qui t’habite.

Décaler son désir, lui donner un silence, un écart. Différer son intention, inventer l’outil qui mène plus loin que soi. Aller vers son ignorance jusqu’à demain. Les consignes précises et limitées captivent et libèrent comme la respiration d’un pas devant l’autre. Ta consigne est le plus bel outil.

Les livres (...) S’ils ne sont pas lus, ce n’est pas grave : ils ont été écrits et un djinn saura les dévoiler à l’énoncé d’un vœu.
Tout est à sa juste place.
Avant la benne.

Peins ce qui ne peut être ni filmé ni photographié. Peins l’inviolable intimité.

Peindre, écrire ou chanter apprivoisent le vide sans le remplir.
Le monochrome est un soulagement quand il efface doucement tout ce qui a occupé ce territoire pour se contenter d’être parmi les autres sans aucune preuve.

Peindre et un miroir qui nous reflète lourdement tant qu’on a pas compris qu’un léger déplacement de soi permet à tout le ciel de s’y refléter.

Sans fureur, recouvrir, recommencer, continuer. Peindre est l’acte de peindre, il n’y a rien à voir, bien des cyclistes ne regardent jamais le paysage.

Le peintre est un entonnoir qu’il finit par se mettre sur la tête affligée de perceptions.

Une peinture qui dit : - viens voir ce que j’ai trouvé !

Tu proposes de graver des poèmes sur les pneus des tracteurs qui lissent le sable des plages chaque matin.

Parce qu’à la télévision les femmes sont belles, les hommes sont riches, les voitures sont neuves, les maisons luxueuses, tout le monde s’entretue et personne ne pisse.

Les gens sourient à la télévision les présentatrices sont impeccables, des professionnels sérieux distribuent des opinions, les penseurs étouffent dans les formats TV et personne pour dire à quoi on joue.

Tu raccommodes lentement les secondes pour en faire des minutes, puis des heures et du temps.
Il en faut pour contempler.

Sinon, c’est si simple, vivre consiste à vivre.

Aux retrouvailles du vernissage tu entends le brouhaha des sujets inabordés entre perdus de vue. Hiératique, la peinture accueille les regards ou leur absence.

N’oublie pas ce que tu as accompli, refuge pendant l’orage, il n’y pleut pas.

Tout t’échappe mais il te reste suffisamment de manières pour paraître normal. On ne sait pas ton abîme face au silence qui le cache.

Les autres restent un mystère, tu les observes sans en connaître la langue, c’est un charabia continu. Comment se fait-il qu’ils s’intéressent à ceci ou cela ? Non, plutôt : comment se fait-il que tu ne t’intéresses pas du tout à cela ?

Qu’as-tu perdu pour avoir besoin de gagner ta vie ?

C’est facile de rater sa vie.

Place nette pour les suivants qui retrouveront par hasard quelques bribes et se réinventeront une histoire.
Ta vie est réussie parce qu’elle est là. Mort, tu appartiens au silence qui recouvre ce qu’on croit essentiel et important jusque-là. Tout ce que tu peins, tout ce que tu écris, tout ce que tu photographies, dessines, tous s’éteindra comme la lumière la nuit.
À moins qu’un autre allume la lumière en cherchant dans le noir du sens perdu.

Les journées sont une façon de passer le temps. Peindre, regarder un feu de bois, le paysage ou un film. Éplucher des légumes, parler à sa voisine, garer sa voiture, administrer, ne rien faire. Produire simplement une invitation qui nous isole de la mort, qui nous fait vivre sur terre selon la chance qui nous a fait naître ici, comme ça.

N’y a-t-il pas autant de royaumes à inventer que de personnes ? Autant d’oriflammes que de monnaie à battre ? Chacun cherche son royaume de lumière. Regarde les branches des arbres, une fête.
Peu importe la plupart des choses, l’important est ce qui nous invite à vivre. L’autre, l’art, l’amour ? Le festin des trois.

Livre de Pierre Desvaux, artiste peintre

 

Pour vous procurer AQTP, il faut le mériter !
Faîtes une demande sur formulaire AQTP 0-5, 6-10, 11-14…
Non, plus simplement, demandez à Pierre Desvaux de bien vouloir procéder à un retirage, car seules 10 personnes sur 7,7 milliards d’habitants ont pu recevoir à ce jour leur exemplaire. N’ayez pas peur de revendiquer le droit d’obtenir le vôtre.
Page contact sur son site https://pierredesvaux.com/

 

D'autres extraits de "AQTP" :  Page 2 et Page 3

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