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Eve Adam 36 – Autostop en goélette

par Hélène Grenier 22 Septembre 2021, 10:00 Ecriture Hélène Grenier Atelier d'écriture Autofiction

La jeune fille ne comprend pas tout de suite pourquoi je lui tends cette poignée de porte...

[Suite des souvenirs d'Eve Adam, en réalité Christine Adam, écrivant sous le pseudonyme d'Hélène Grenier.]

Un soir de 1979. Je reviens de Vannes au volant de notre fourgon Renault «Goélette» de 1962. Ce fourgon postal a été acheté cinq auparavant aux «Domaines» pour la somme de cinq-cents francs. Nous l’avons entièrement repeint de formes géométriques, noir, rouge et crème.

 

Une jeune autostoppeuse me fait signe sur le bord de la route. Elle est mignonne sur ses fins escarpins, dans sa robe légère et fleurie. J’arrête ma «Goélette» qui tressaute sur le bas-côté avant de s’immobiliser. «Vous allez où ? – Au bal à Rochambert.»

 

Par la fenêtre entrouverte côté passager, je tends à l’auto-stoppeuse étonnée une poignée de porte type «bec de canne» en lui demandant de l’enfiler dans la portière extérieure du véhicule afin de l’ouvrir. La jeune fille ne comprend pas tout de suite pourquoi je lui tends cette poignée de porte et je dois lui réexpliquer que la portière ne s’ouvre plus de l’intérieur, et que c’est le moyen pour elle de monter à bord. Avec étonnement, la jeune fille accepte de prendre la poignée, l’enfile et l’actionne pour ouvrir, puis s’installe sur le siège avant.

 

Elle n’a pas remarqué que le siège avant est en fait un tabouret canné dont les pieds ont été sciés pour permettre de s’asseoir à la bonne hauteur. Le siège avant d’origine a disparu depuis longtemps. Quand je démarre, avec une certaine rudesse involontaire car la Goélette ne se manœuvre pas facilement, le tabouret qui n’est pas fixé au sol bascule en arrière avec la jeune fille assise qui se retrouve couchée sur le dos et ses jolies jambes en l’air dans la partie arrière du fourgon, où sont entassés en désordre vieux bidons et chiffons.

 

Je m’arrête pour que la jeune fille se réinstalle, et je compatis avec empathie pour sa tenue froissée et tachée. Après une dizaine de kilomètres, nous arrivons au bourg de Rochambert, qui est sa destination. Là où je me gare, la route est légèrement en pente. Je préviens ma passagère qu’elle ne peut pas descendre par son côté car je lui rappelle que la porte ne s’ouvre pas de l’intérieur. Elle va devoir descendre par la porte côté conducteur, et donc me laisser descendre en premier pour lui laisser la place. Cependant, comme le frein à main ne fonctionne plus, elle va devoir appuyer sur la pédale de frein pendant que je suis au-dehors, et ne pas la relâcher avant que je ne puisse appuyer dessus à mon tour, mais surtout ne pas lâcher la pression à aucun moment car la Goélette risque de mettre les voiles.

 

Mon intention n’était pas de lui causer de problème, mais je pense que cette jeune fille a renoncé à l’autostop après cette expérience.
 

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